La Société d’exploitation de la Tour Eiffel a été condamnée à 18.750 euros d’amende et à un euro symbolique de dommages et intérêts par le tribunal correctionnel de Paris.
La société d’exploitation de la Tour Eiffel (SETE) a été condamnée le 11 octobre dernier à 18 750 euros d’amende et à un euro symbolique de dommages et intérêts par le tribunal correctionnel de Paris. Ce dernier a considéré que la société n’avait pas permis à ses salariés de se protéger suffisamment lors de travaux de rénovation du monument lancés en mars 2012 pour moderniser le premier étage de la Tour Eiffel.
Les travaux du premier étage du monument le plus visité de Paris ont été entrepris en 2012 afin de réaménager les pavillons du premier étage de la Tour: pendant toute la durée du chantier, le site est resté ouvert au public et les salariés ont continué à y travailler. En avril 2012, peu après le début des travaux, le Bureau Veritas, spécialisé dans les inspections règlementaires de bâtiments, produit un rapport attestant de la présence de fortes concentrations de plomb à certains endroits dans les pavillons. Les travaux se poursuivent malgré tout.
En juillet 2012, un incident mineur se produit sur le chantier et un inspecteur de la Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France (CRAMIF) se rend sur les lieux: il voit un ouvrier tronçonner une partie de la structure d’un pavillon et remarque que celle-ci est recouverte d’une peinture orange soutenu, couleur caractéristique des peintures au plomb. Il demande à la SETE d’interrompre le chantier et de procéder à une dépollution des parties concernées. Une analyse plus poussée révèlera des taux de plomb jusqu’à 30 fois supérieurs aux normes règlementaires. Aucune mesure spéciale de protection n’avait été prise, et pour cause: le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) n’avait jamais été mis au courant de l’existence du rapport.
«Le rapport a été caché»
Selon les avocats du CHSCT, Mes Valérie Schneider et Thibault de Montbrial, «le rapport a été caché». «Ce n’est absolument pas un ratage. La direction de la SETE savait que ce rapport existait et l’a dissimulé. Le CHSCT n’a appris l’existence de ce rapport qu’en août 2012, une fois que le chantier a été interrompu à la demande de l’inspecteur de la CRAMIF», affirment Mes Valérie Schneider et Thibault de Montbrial, contactés par Le Figaro. «Le rapport faisait état noir sur blanc de la présence de plomb à des taux très importants dans les peintures. La SETE aurait dû communiquer ces informations au Comité d’Hygiène et prendre des mesures de protection beaucoup plus tôt», ajoutent-ils.
Le CHSCT a saisi le tribunal correctionnel de Paris sur le sujet. Ce dernier a estimé que la SETE, en ne donnant pas le rapport d’expertise au CHSCT, avait causé une entrave grave à son bon fonctionnement: la société a donc été condamnée à une amende de 18 750 euros pour délit d’entrave et au versement d’un euro symbolique de dommages et intérêts.
«C’est un simple défaut d’information», expliquent les avocats du CHSCT. «Ces questions doivent être abordées lors des réunions, et non devant les tribunaux. La SETE n’a pas appliqué une disposition du Code du travail, et la CHSCT a souhaité frapper un grand coup pour que cela ne se reproduise plus à l’avenir». La SETE ne fera d’ailleurs pas appel de sa condamnation.
Depuis sa construction, la Tour Eiffel nécessite d’être totalement repeinte tous les sept ans. En 2009 déjà, la présence de plomb avait été suspectée lors des travaux de peinture : une partie des travaux avait été suspendue et des analyses toxicologiques effectuées sur les 25 peintres travaillant sur le chantier. Les suspicions ne portant que sur de petites zones, le chantier avait repris quelques jours plus tard. «Il n’y avait pas de risques ni pour les visiteurs, ni pour les salariés», précisent les avocats du CHSCT. «La SETE a été condamnée pour la dissimulation d’informations, et non pour la mise en danger des salariés et des visiteurs». La SETE n’était pas disponible pour commenter ce jugement.