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Raouf El Ayeb, l’homme qui a foncé sur des militaires a été condamné ce mercredi soir à 17 ans de réclusion criminelle pour tentative de meurtre. La cour d’Assises de la Drôme est allée au-delà des réquisitions de l’avocat général.
Les Assises de la Drôme ont rendu leur verdict ce mercredi soir un peu après 21h30. L’homme qui a foncé sur les militaires à Valence le 1er janvier 2016 est coupable de tentative d’homicide et condamné à 17 ans de réclusion criminelle. Les jurés n’ont pas retenu l’altération de son discernement et demandé un suivi socio-judiciaire durant cinq ans.
Douze ans de réclusion requis
La cour est allée au-delà des réquisitions de l’avocat général. Lui avait retenu l’altération mentale. Pour lui, aucun doute après les trois jours de débats et les témoignages des nombreux experts psychiatres et psychologues qui se sont contredits. « Oui aujourd’hui Raouf El Ayeb est malade. Mais au moment des faits, il n’était qu’en altération du discernement. La justice peut donc le juger ». Le magistrat précise : il encourt normalement la perpétuité pour tentative d’homicide sur personnes dépositaires de l’autorité publique. Si on retient l’altération, il faut diminuer la peine et on passe alors à un maximum de 30 ans. Compte tenu des faits, l’avocat général requiert une peine criminelle, de 12 ans, pas moins.
Tentative d’homicide
Pour Thibault de Montbrial, l’avocat des quatre militaires, une certitude : le père de famille de Bron a bien eu l’intention de tuer les quatre militaires en leur fonçant dessus en voiture. La tentative d’homicide ne fait pour lui aucun doute. La meilleur preuve, ce sont les déclarations de l’accusé lui-même dans l’ambulance des pompiers quelques minutes après les faits :
« Les militaires tuent des gens, ils doivent mourir. »
Mais l’avocat retient aussi des éléments dans les circonstances des faits. Sur la trajectoire du véhicule, il n’y a aucune trace de freinage, aucune trace d’évitement. Il fonce droit sur les soldats après avoir attendu le moment où les quatre hommes étaient regroupés. « Pour n’avoir qu’une cible sur laquelle foncer, comme une boule qui vient frapper des quilles » précise Maître de Montbrial.
Un acte d’inspiration islamiste
Pour l’avocat spécialiste de ce genre de dossier et président du centre de réflexion sur la sécurité intérieure, il faut aussi voir dans cette attaque un geste d’inspiration islamiste. Pas un acte terroriste, puisque la justice n’a pas retenu cette qualification notamment parce qu’il n’y a pas eu de blessé grave. Mais pour lui, certains éléments sont typiques des attaques d’inspiration islamiste. Il y a d’abord le contexte de vie de l’accusé. Raouf El Ayeb est un tunisien d’origine, arrivé en France depuis une dizaine d’années et en plein déclassement social. Son entreprise vient de péricliter. Sa religiosité s’est accrue lors des mois précédents et il ne parle d’aucun de ses problèmes à ses proches. Enfin, l’attaque à la voiture bélier fait partie de ce que les salafistes préconisent comme type d’attaque.
Un malade que l’on veut juger comme un terroriste
Maître Philippe Tatiguian, défenseur de Raouf El Ayeb, s’insurge. Bien sûr il y a eu des violences mais aucune intention de tuer. Les conséquences ne sont pas assez graves : les deux soldats blessés n’ont que 5 et 8 jours d’ ITT (interruption temporaire de travail), cela ne correspond pas à la gravité des blessures si on a l’intention de tuer. Et l’avocat reprend : « on veut faire le procès d’un terroriste mais c’est un malade mental, un schizophrène ! » Il ajoute :
« Oui tous les actes terroristes sont fous, mais tous les fous ne sont pas terroristes. »
Il doit être soigné car, poursuit l’avocat de la défense, « dans une société civilisée, on ne juge pas les malades mentaux. La vérité, c’est que vous jugez un malade. Était-il dans cet état au moment des faits ? Sa schizophrénie a commencé un peu avant et a empiré jusqu’au jour des faits avec -je le concède- une coloration religieuse car il essaye de trouver de l’aide là dedans. Mais oui, il avait déjà des troubles psychotiques, les prémices de sa maladie mentale, sauf que ça embête tout le monde car ça oblige à condamner un peu moins. Mais rappelez vous que le doute doit profiter à l’accusé ».
« Je demande de tout mon cœur aux militaires de m’excuser. » – Raouf El Ayeb, accusé
Les excuses de l’accusé
Ce mercredi midi, l’accusé s’est adressé directement aux victimes. Une première depuis lundi après-midi et le début du procès. Raouf El Ayeb : « Je demande de tout mon cœur aux militaires de m’excuser« . Et l’accusé a conclu : « Je suis très content qu’il ne vous soit rien arrivé de grave ».