Un « stock d’armes » a été découvert au domicile de l’homme qui a projeté son véhicule contre un fourgon de gendarmerie sur les Champs-Élysées, lundi 19 juin après-midi. L’autorisation de détention d’armes dont il disposait fait polémique. Explication.
Que sait-on de l’attaque de lundi 19 juin sur les Champs-Élysées ?
Lundi 19 juin, peu avant 16 heures, un Français de 31 ans, fiché S depuis 2015 pour radicalisation, a foncé avec sa voiture contre un véhicule des gendarmes mobiles sur les Champs-Élysées. Son véhicule a explosé peu après que les gendarmes ont tenté de l’en extraire. Selon plusieurs médias, une – ou deux – bonbonnes de gaz fermée(s), sans dispositif de mise à feu, un fusil d’assaut israélien, deux armes de poing et un important stock de munitions ont été retrouvés dans l’habitacle.
Son ex-épouse ainsi que son frère et sa belle-sœur ont été interpellés en fin d’après-midi lors des perquisitions au domicile de cette famille décrite comme salafiste et habitant dans l’Essonne. Le parquet antiterroriste de Paris s’est saisi de l’enquête.
Y a-t-il eu des failles dans le dispositif sécuritaire ?
L’homme disposait d’un permis de détention d’armes à titre sportif, accordé initialement avant qu’il ne soit fiché, mais qui avait été renouvelé en février 2017, ce qui pose question : comment un homme considéré comme potentiellement dangereux a-t-il pu disposer d’une autorisation de détention ? « La procédure pour obtenir un permis de détention d’arme est longue et minutieuse, commence l’avocat Thibault de Montbrial. La préfecture conduit notamment une enquête administrative poussée de trois mois durant laquelle elle peut consulter un certain nombre de fichiers. »
La préfecture s’assure que la personne n’est pas inscrite au fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes, qu’elle n’a jamais été condamnée, qu’elle n’a pas été hospitalisée pour des raisons psychiatriques… Autant de critères remplis par l’assaillant.
Peut-elle aussi consulter le fichier des personnes recherchées (FPR), qui comprend les fameuses fiches S ? Les réponses, sur ce point, divergent. « Certains services le peuvent, comme les plateformes passeport », explique un préfet. Mais ce n’est pas forcément le cas pour les bureaux des armes. « Ces fichiers de renseignement n’ont pas vocation à être accessibles par tous, car ils comprennent des éléments qui ne sont pas établis en droit, ce sont des suspicions », note ce haut fonctionnaire. Ce qui n’empêche probablement pas quelques vérifications non officielles entre les préfectures et les services de renseignements…
Faut-il revoir la gestion des fichiers ?
« Personne ne peut se satisfaire » que « quelqu’un qui fait l’objet d’un signalement puisse continuer à bénéficier » d’une autorisation de détention d’armes, a réagi le premier ministre Édouard Philippe mardi 20 juin. « Des décrets sont en cours de finalisation pour permettre à certains agents préfectoraux d’avoir un accès direct au fichier des personnes recherchées », a expliqué de son côté le ministère de l’intérieur. Dans l’autre sens, « les services de renseignements pourraient vérifier régulièrement le fichier Agrippa qui recense les personnes autorisées à détenir une arme », propose Thibault de Montbrial.
Dans le cas présent, la DGSI aurait permis en toute connaissance de cause le renouvellement de l’autorisation de détention d’arme accordée à l’assaillant pour ne pas éveiller ses soupçons sur la surveillance dont il faisait l’objet. Une hypothèse argument qui ne semble « pas crédible » à Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme. « Il y a eu soit un dysfonctionnement des services préfectoraux, soit une très mauvaise évaluation de la dangerosité de cet homme par les services de renseignements. »