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UN AN APRÈS LES ATTENTATS DE PARIS

Bien que nourri par des centaines de fonctionnaires issus de la fine fleur de la police et par six juges antiterroristes, le colossal dossier judiciaire des attentats de Paris épais de plusieurs milliers de pages, que Le Figaro a pu consulter, reste émaillé de points d’interrogations.

Les attentats du vendredi 13 novembre, la pire tragédie qu’ait jamais connue la France depuis la Seconde Guerre mondiale, sont toujours nimbés de mystères. Autant de zones d’ombre qui empêchent les familles de faire le deuil des 130 morts tombés sous les balles et les explosifs des kamikazes. Ou de panser les plaies des quelque 400 blessés par la vague sanglante. Un an après les faits, l’identité du fantomatique «cerveau» demeure au cœur de toutes les supputations. À huis clos le 24 mai dernier devant la commission parlementaire présidée par Georges Fenech, le directeur général de la sécurité extérieure (DGSE) Bernard Bajolet a juste lâché: «Nous connaissons le commanditaire, mais je resterai discret sur ce point…» Entendu le 29 juillet dernier de manière peu ordinaire à l’hôtel des Invalides par un des magistrats instructeurs soucieux d’en savoir plus, le patron français de l’espionnage a poliment refusé d’en souffler davantage. Motif? Ne pas mettre en danger les «sources» du service. Depuis lors, rien ou presque ne filtre sur cet énigmatique personnage. Juste un nom de guerre: celui d’«Abou Ahmed». Présenté comme l’«émir supposé», ce francophone haut placé dans l’appareil de l’État islamique aurait imaginé puis orchestré depuis la Syrie, peut-être Raqqa où il a été localisé en octobre 2015, les attaques de Paris et Saint-Denis, mais aussi celles du 22 mars dernier à Bruxelles.

Comme s’il était nécessaire de noircir un trombinoscope déjà encombré, un autre «cerveau» présumé, Abou Souleymane al-Faransi, est épinglé par les services américains comme le «planificateur» du 13 novembre. Son vrai nom est Abdelilah Himich. Membre des services de sécurité de Daech, ce Marocain d’origine né à Rabat en 1989 mais ayant grandi à Lunel, «nid» djihadiste d’où sont partis une vingtaine de «soldats du Sham», aurait soumis les projets de tueries à Abou Bakr al-Baghdadi en personne, calife autoproclamé de l’État islamique. Volontiers présenté comme le «Français le plus haut placé» de l’organisation terroriste, retranché quelque part en Syrie depuis 2014, il se serait d’abord engagé dans les rangs d’al-Qaida avant de rejoindre Daech. «Himich a été décoré par la France et l’Otan après avoir servi six mois dans la Légion étrangère en Afghanistan», assure Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme. Des faits d’armes remontant à 2008 sur lesquels les autorités françaises n’éprouvent manifestement guère l’envie de s’épancher. Hasard du calendrier, Himich se serait enrôlé un certain 13 novembre… «De toutes les façons, argue un expert, la genèse des attentats n’a pas germé dans une seule tête, c’est avant tout le fruit d’une décision collégiale.»

«Le flou qui persiste sur le ou les vrais commanditaires est plus que préoccupant, renchérit de son côté Me Thibault de Montbrial, conseil d’une vingtaine de victimes, dont deux policiers hors service pris au piège du Bataclan. Connaître l’éventuelle cellule ayant orchestré la vague d’attentats n’a pas seulement un intérêt documentaire pour éclairer le passé: c’est crucial pour anticiper les risques d’une réplique à l’approche des fêtes de fin d’année…»

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